Gestion alternative

Marché des fonds de private equity secondaires : la liquidité et bien plus

31 octobre 2023 | 15 minute(s) de lecture
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Suzanne Gauron
Head of Private Equity Strategies, Alternatives Capital Markets & Strategy
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Harold Hope
Global Head of Vintage Strategies, External Investing Group
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Gabriel Mollerberg
Secondaries Investment Team, External Investing Group
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Thom Spoto
Secondaries Investment Team, External Investing Group
Perspectives
Cette publication fait partie de la série Perspectives
Principaux points à retenir
1
Avec la maturation du marché des fonds de private equity primaires et la multiplicité des transactions secondaires, de nouvelles compétences et une capacité d’adaptation sont requises pour structurer des solutions de capital répondant aux besoins complexes des investisseurs (LP) et des gérants (GP) de transactions primaires, ainsi que des entreprises de leur portefeuille.
2
Les transactions secondaires se développent rapidement dans des stratégies allant au-delà des buyouts, pour inclure notamment les actifs réels et le crédit. Les décotes sur ces actifs ont tendance à être plus importantes que sur les stratégies de buyout traditionnelles, en partie à cause du nombre plus restreint d’acheteurs potentiels, mais en raison aussi de leurs profils de rendement plus faibles qui nécessitent une décote plus importante pour atteindre les objectifs minimums de performance des opérations secondaires spécialisées en actions.
3
Les solutions de capital portant sur des transactions secondaires, y compris les fonds de continuation et les actions privilégiées, sont de plus en plus utilisées par les GP pour optimiser la gestion de leurs propres fonds et offrir un ensemble plus dynamique d’options de sortie à leurs LP, tout en approfondissant leurs relations avec des entreprises solides et en ouvrant la porte à de nouveaux investisseurs.

Les fonds secondaires sont souvent sollicités par les investisseurs pour obtenir une exposition aux marchés non cotés tout en tirant parti d’avantages supplémentaires, tels que la limitation de la courbe en J ou encore la diversification. Bon nombre de leurs caractéristiques sont plus étroitement associées aux traditionnelles cessions de portefeuilles de LP, mais, ces deux dernières décennies, les gérants de fonds secondaires ont également proposé d’autres types de solutions capitalistiques aux GP et aux LP, depuis les spin-outs d’équipes jusqu’aux notes structurées, qui offrent un accès différencié aux marchés non cotés. Aujourd’hui, les fonds de continuation et les structures « preferred equity » sont devenus plus courants. À mesure que l’activité évolue de la cession de portefeuilles de LP vers des solutions plus personnalisées, les investisseurs doivent prendre la mesure des compétences nécessaires pour l'identification, la souscription et la conclusion de ces transactions plus compliquées et tenir compte des implications en termes du profil risque/rendement des différents types de transactions.

Évolution des fonds secondaires

L’évolution des marchés non cotés n’a cessé de proposer de nouveaux défis et de nouvelles opportunités exigeant des solutions de capital uniques. Au fil de leur développement dans les années 1990 et au début des années 2000, les marchés privés sont passés d’un marché de niche américain financé par des particuliers fortunés et un petit nombre d’institutionnels à une classe d’actifs plus large dotée de stratégies distinctes et d’une couverture mondiale. De ce fait, les investisseurs (LP) et les fonds se sont multipliés. Inévitablement, certains d’entre eux, confrontés à des difficultés de liquidité ou au besoin de modifier leur stratégie, ont été contraints de céder des participations. Les gérants responsables des fonds ont compris que transférer les intérêts d’un investisseur à un autre est préférable à un défaut. C’est ainsi qu’est né le marché secondaire avec ses fonds dédiés aux transactions secondaires des LP. Ceux-ci se sont développés au fil du temps pour mener à bien des transactions plus complexes impliquant des portefeuilles multigérants, des transactions structurées ou des cessions partielles d’intérêts (ou strip-sales) conçues pour optimiser la gestion des portefeuilles tout en maintenant l’exposition économique.

Aujourd’hui, avec plus de 10 000 milliards de dollars d’actifs sur les marchés du private equity, de l’immobilier, des infrastructures et du crédit, le marché des transactions secondaires offre une solution de liquidité aux LP désireux de remodeler leurs portefeuilles ou d’adapter leurs stratégies d’investissement à un environnement plus dynamique1. Cependant, en tant qu’investisseurs sophistiqués sur les marchés du non coté, disposant de capitaux flexibles, d’une expertise en matière de valorisation et d’une capacité à gérer la complexité, les gérants de transactions secondaires fournissent également depuis longtemps des solutions à d’autres intervenants du marché. Au milieu des années 2000, certains spécialistes du non coté secondaire se sont associés à des banques désireuses de réorganiser leurs équipes internes de private equity qu’elles ont fini par filialiser créant ainsi de nouvelles sociétés financées par leurs portefeuilles existants, dans le cadre de « secondaires synthétiques ». Au cours des dix dernières années, les sociétés spécialisées dans les transactions secondaires ont joué un rôle clé en aidant les GP à trouver des solutions créatives pour les portefeuilles hérités et pour la gestion de leurs actifs pendant les périodes de perturbation. En effet, de nombreux investisseurs détenant des portefeuilles de titres non cotés matures passent désormais par le marché secondaire pour gérer leur allocation de portefeuille et pour résoudre leurs problèmes de liquidités.

Cette créativité et cette flexibilité du capital, combinées à des performances attractives pour les investisseurs en secondaires, ont contribué à alimenter une activité soutenue dans les fonds de secondaires, dont les actifs sous gestion ont atteint plus de 550 milliards de dollars au premier trimestre de 2023. En parallèle de cette croissance rapide, les actifs sous gestion du non coté (c’est-à-dire la source de l’offre en transactions secondaires) ont augmenté plus vite encore que les transactions secondaires (20 % de TCAC contre 17 % depuis 2018). Par conséquent, le marché secondaire reste sous-capitalisé par rapport au marché du non coté dans son ensemble, d’où il tire son potentiel d’opportunités. De plus, le marché des secondaires reste lui-même relativement concentré, les 10 premiers acheteurs représentant à eux seuls au moins 55 % de l’activité depuis 20212. Toutefois, le marché primaire étant parvenu à maturité et la diversification des transactions secondaires se poursuivant, les spécialistes des transactions secondaires ne peuvent plus se contenter de jouer la carte de la taille et de l’échelle pour être compétitifs. De nouvelles compétences sont nécessaires et il convient de faire preuve d’adaptabilité pour structurer les solutions de capital afin de répondre aux besoins variés des LP et des GP du marché primaire, ainsi qu’à ceux des entreprises de leur portefeuille.

Capitaux disponibles relativement faibles pour les secondaires au regard du potentiel d’opportunitésCapitaux disponibles relativement faibles pour les secondaires au regard du potentiel d’opportunités

Source : Jefferies Global Secondary Market Review – Juillet 2023. Capitaux excédentaires = capitaux disponibles/volume des opérations.

 

 

Solutions de liquidité

Cessions de portefeuilles de LP

Les cessions de portefeuilles de LP furent les premières transactions secondaires à être réalisées et représentent désormais la plus grande partie du marché. À ses débuts, le marché secondaire se caractérisait souvent par des transactions non économiques résultant de tensions au niveau des LP vendeurs (en raison de contraintes de liquidités, de changements stratégiques, de changements réglementaires ou de modifications de la situation des investisseurs individuels). Par conséquent, les pourvoyeurs de liquidité pouvaient acquérir des participations avec des décotes souvent importantes par rapport à leur valeur nette d’inventaire. 

Variation des décotes dans les transactions secondaires en fonction des stratégies et des conditions du marchéVariation des décotes dans les transactions secondaires en fonction des stratégies et des conditions du marché

Source : Greenhill Cogent, Jefferies. À fin juin 2023.

 

 

Toutefois, au cours de la décennie écoulée, davantage de transactions ont été effectuées dans des conditions de marché favorables, le marché secondaire n’étant plus considéré uniquement comme un carrefour des situations de détresse. Désormais, les cessions de portefeuilles de LP sont largement vues comme un outil de gestion de portefeuille utile pour ajuster les expositions, libérer du capital et des ressources humaines d’engagements plus anciens ayant largement fait leur temps ou encore pour sécuriser les plus-values. De nouveaux acheteurs et vendeurs étant entrés sur le marché des fonds secondaires traditionnels, les prix se sont globalement stabilisés et les décotes par rapport à la VNI se sont réduites. Ainsi, même après la forte chute des prix et des volumes des transactions secondaires au premier semestre de 2020 sous l’effet du début de la pandémie de COVID-19, le marché avait retrouvé ses niveaux d’avant la pandémie dès le premier semestre de 2021.

Les spreads acheteur-vendeur se sont à nouveau creusés en 2022, quand les perturbations des marchés publics et le ralentissement de l’activité transactionnelle ont rendu plus difficile l’entente sur les prix entre acheteurs et vendeurs. Pourtant, si le volume des transactions a ralenti en 2022, l’année a tout de même été l’une des plus dynamiques jamais enregistrées en termes de transactions réalisées et les prix ont rebondi au premier semestre 2023, démontrant ainsi la profondeur et la résilience accrues du marché. Un des facteurs contribuant à la résilience du marché est la plus grande disposition des vendeurs à permettre aux acheteurs de sélectionner certains des actifs à inclure dans les cessions de portefeuilles, ce qui peut contribuer à la fixation de prix réalistes.

Si le marché secondaire traditionnel devient plus liquide, la plupart des transactions se font encore avec une décote par rapport à la VNI. Les fonds plus récents, dont les actifs ont plus de temps pour s’apprécier, se vendent généralement à un prix plus proche de la VNI, tandis que les fonds plus anciens ont tendance à afficher des décotes plus importantes ; au premier semestre 2023, les fonds de buyout de moins de cinq ans se sont vendus en moyenne à 91 % de la VNI, tandis que les millésimes de 2012 ou antérieurs se sont vendus en moyenne à 73 % de la VNI3. Les investisseurs se sont tournés vers les fonds plus récents, avec un âge moyen de 7,0 ans au premier semestre 2023. C’est la première fois depuis 2014 que l’âge moyen des fonds cédés passe sous la barre des 8 ans. Un autre facteur qui a soutenu la fixation des prix en 2023 est le recours aux reports, grâce auxquels les acheteurs peuvent financer une partie des transactions à une date ultérieure en échange d’un prix plus élevé.

Les décotes sur le marché secondaire reflètent également la complexité des transactions, ainsi que le type, la qualité et la connaissance des actifs concernés. Ainsi, le segment du marché secondaire où les prix sont les plus justes est celui des participations dans des fonds de buyout traditionnels, qui ont représenté 72 % du volume des transactions secondaires en 2022 et au premier semestre 20234.

Nouveaux genres de portefeuilles

À mesure que les marchés non cotés se sont développés pour intégrer un éventail d’actifs plus large, certains gérants de transactions secondaires ont élargi leur expertise à des stratégies adjacentes telles que l’immobilier, l’infrastructure et le crédit privé. Ces actifs étaient auparavant souvent intégrés à des ventes de portefeuilles dans le cadre de transactions plus larges ou exclus des cessions. Désormais, les cessions de portefeuilles de LP plus importants et les fonds secondaires plus spécialisés permettent des opérations dédiées dans ces segments. Les décotes pour ces actifs ont tendance à être plus importantes que pour les stratégies de buyout traditionnelles, en partie à cause du nombre plus restreint d’acheteurs disposant de l’expertise nécessaire pour la valorisation de ces actifs, mais en raison aussi de leurs profils de rendement plus faibles qui nécessitent une décote plus importante pour atteindre les objectifs de performance des opérations secondaires spécialisées en actions. Ces stratégies constituent quelques-uns des segments du marché secondaire qui se développent le plus rapidement, à mesure que des sociétés spécialisées arrivent sur le marché et que des acteurs établis du marché secondaire lancent des véhicules dédiés.

L’opportunité qui se profile derrière les transactions secondaires dans l’immobilier, les infrastructures et le crédit privé s’appuie sur la croissance à long terme caractéristique de ces classes d’actifs, qui représentent aujourd’hui plus de 3 000 milliards de dollars. De nombreux LP impliqués dans ces fonds primaires reconsidèrent également la manière dont ils définissent et classent les différents actifs, ce qui conduit à une réévaluation généralisée de l’exposition à ces actifs, d’où un besoin accru de solutions de liquidité. Dans l’immobilier, par exemple, les immeubles de bureaux et centres commerciaux plurilocataires – autrefois acquis pour leurs caractéristiques essentielles et la sécurité qu’ils inspiraient – ne sont plus considérés comme des investissements « à mettre en place puis à oublier ». À l’inverse, les actifs industriels et le résidentiel locatif, généralement considérés comme moins stables dans le passé en raison de la durée plus courte des baux, de leur structure en copropriété et du risque élevé de surconstruction sur les marchés en expansion, font aujourd’hui figure de « biens immobiliers de base », bénéficiant d’une demande saine, d’une croissance exceptionnelle et de marchés de capitaux très liquides. Au moment où les LP cherchent à rééquilibrer leurs profils de risque, les marchés secondaires peuvent leur permettre de redéployer leurs capitaux avec plus de facilité.

Solutions capitalistiques

La liquidité, mais pas seulement

Si les transactions secondaires classiques des investisseurs restent au cœur du marché secondaire, d’autres types de solutions de capital ont pris de l’importance ces dernières années. Au-delà de la seule recherche de liquidité, de nombreux investisseurs recherchent des structures qui leur permettront d’allonger les périodes de détention et par conséquent la capitalisation des rendements, comme en témoigne l’essor des fonds de private equity à long terme, avec des horizons de 20 ans ou plus. Une grande partie de l’activité dans ce domaine était initialement dédiée aux GP développant des stratégies « buy and build » et de transformation technologique pour créer de la valeur dans les entreprises en portefeuille – des approches, dont la mise en œuvre et la maturation, peuvent nécessiter plus de temps que ce que permet la structure classique des sociétés en commandite.

En effet, une société en commandite classique a une durée de 10 ans, généralement assortie de deux prorogations d’un an, ce qui limite le temps dont dispose un GP pour mettre en œuvre ses plans de création de valeur. Durant cette période de dix ans, il y a généralement une période d’investissement de quatre ou cinq ans, et les LP s’attendent généralement à voir apparaître des liquidités lorsque le fonds est entièrement investi et que le GP lève à nouveau des fonds. Compte tenu de cette dynamique, les GP peuvent ressentir une certaine pression à vendre des actifs quatre ou cinq ans après avoir réalisé l’investissement, sans chercher nécessairement à en maximiser la valeur. Certains investisseurs privés ont mis en doute la capacité des fonds de private equity à générer des performances excédentaires sur des périodes plus longues, mais des études récentes montrent que les performances des transactions entre fonds de private equity, dans le cadre desquelles un GP vend un investissement à un autre GP, sont comparables à celles des opérations de buyout traditionnelles. Cela vient appuyer l’argument selon lequel les GP sont capables de mettre en œuvre des plans opérationnels et des stratégies d’acquisition ciblés en fonction de stades spécifiques de développement et de rentabilité.

Le marché secondaire peut fournir des solutions de capital permettant aux GP de continuer à détenir des actifs bien connus dans lesquels ils ont une forte conviction et pour lesquels ils disposent d’un plan bien défini de création de valeur supplémentaire, tout en offrant aux LP existants une option de liquidité et en permettant l’entrée de nouveaux LP. Ces solutions de capital, qui se distinguent des cessions de portefeuilles de LP, ont évolué à partir de transactions de « restructuration de fonds », qui impliquaient souvent des situations complexes avec des problèmes au niveau des actifs sous-jacents, des GP, ou des deux à la fois. À l’instar des cessions de portefeuilles de LP, qui de marché axé sur les vendeurs en difficulté confrontés à des problèmes de liquidité ont évolué vers un marché plus robuste (et moins mal perçu) de restructuration des portefeuilles, ces transactions de « restructuration de fonds » sont passées d’opérations conçues pour remédier à des situations difficiles à un marché axé sur des actifs de haute qualité gérés par des GP de premier plan désireux de développer des plans de création de valeur et de réaligner les intérêts. Grâce à ces nouveaux outils, les GP peuvent chercher à optimiser la gestion de leurs propres fonds et offrir un ensemble plus dynamique d’options de sortie à leurs LP, tout en approfondissant leurs relations avec des entreprises solides et en ouvrant la porte à de nouveaux investisseurs. Cette tendance s’est intensifiée en 2022 et 2023, car confrontés à un ralentissement des sorties et à des conditions de financement plus difficiles, les GP ont été contraints de rechercher des options créatives.

Fonds de continuation

Les fonds de continuation ont plusieurs objectifs : la liquidité pour les LP souhaitant se désengager, la possibilité pour les LP en place de maintenir leur exposition à l’actif et l’opportunité pour de nouveaux investisseurs de s’exposer à un actif de haute qualité géré par un GP déjà profondément impliqué dans l’activité, offrant une période de détention prolongée et de nouveaux capitaux pour financer la poursuite de la croissance. Ces transactions impliquent généralement le transfert du ou des actifs cibles du fonds d’origine vers un nouveau fonds. Les LP existants peuvent alors choisir entre recevoir le produit en espèces et sortir de l’investissement, ou conserver une participation au prorata dans le nouveau fonds. Le gérant du fonds secondaire fournit généralement une juste valeur marchande indépendante pour la transaction, négocie la structure et les conditions du véhicule de continuation afin d’en garantir l’alignement et fournit le capital qui permet de racheter les participations des LP qui se retirent.

Les fonds de continuation sont conçus sur mesure et varient considérablement en termes de taille et de structure, certains étant centrés sur un seul actif tandis que d’autres détiennent des actifs plus diversifiés. Les investisseurs du véhicule de continuation ont l’avantage d’investir dans des actifs connus avec un GP qui en comprend déjà intimement le fonctionnement et qui dispose d’un argumentaire convaincant de poursuite de création de valeur. Le GP peut poursuivre l’exécution de ses plans d’action existants, ce qui permet aux investisseurs secondaires et aux LP d’éviter la période de faible croissance, fréquente dans les nouvelles opérations, au cours de laquelle le GP se familiarise avec l’actif et affine ses plans initiaux de création de valeur. La bonne connaissance de l’entreprise par le GP peut également offrir aux nouveaux LP une certaine protection contre les baisses par rapport à un investissement primaire, étant donné que la création de valeur est largement axée sur la poursuite de l’investissement.

Compte tenu du nombre de parties prenantes impliquées dans les opérations de continuation, notamment les LP sortants, les LP restants (dans certains cas), le GP et le fonds secondaire/les nouveaux LP, il est essentiel de veiller à ce que les intérêts des uns et des autres soient bien alignés. Le GP et l’acheteur secondaire négocient généralement de nouvelles structures de frais et des garanties économiques, qui peuvent inclure le réinvestissement dans le fonds de continuation des sommes dégagées par le GP lors de la sortie des LP, ainsi qu’un nouvel investissement de la part du GP. Étant donné que les spécificités de chaque transaction tendent à être uniques, les aspects économiques des fonds de continuation sont adaptés à chaque transaction, mais comprennent généralement des mécanismes tels que des commissions réduites et une révision du taux de rendement minimal.

Une autre considération importante concernant les fonds de continuation est le niveau de concentration plus élevé par rapport aux fonds secondaires classiques. Les fonds de continuation peuvent être constitués d’un portefeuille de participations ou d’un actif unique. Les fonds à actif unique comportent un risque idiosyncrasique plus élevé lié à l’entreprise concernée, ce qui nécessite une construction minutieuse du portefeuille par le gérant secondaire afin d’assurer une diversification adéquate. Par conséquent, la vigilance vis-à-vis des fonds de continuation exige une compréhension et une expertise approfondies qui s’apparentent davantage à ce qu’exige une opération de buyout classique.

Les fonds de continuation ont progressivement gagné en importance avant 2020, passant de moins de 20 % du marché secondaire en 2015 à 30 % de toutes les transactions en 2019, alors même que le volume global avait plus que doublé. Lors de la crise provoquée par la pandémie au début de 2020, de nombreux LP ont abandonné les cessions traditionnelles de portefeuilles en raison de la chute des marchés boursiers et de la hausse des décotes, mais les fonds de continuation ont bien résisté, représentant à eux seuls plus de la moitié du volume total des transactions de l’année. En 2022, les transactions initiées par un GP ont ralenti, de même que le marché secondaire dans son ensemble. Avec le ralentissement des sorties et des distributions en 2022 et 2023, le besoin relatif de cessions de portefeuilles de LP a augmenté, poussant le volume des transactions non traditionnelles à 42 % de l’activité secondaire au premier semestre 20235. Pour l’avenir, nous anticipons une répartition à peu près égale du volume du marché secondaire entre les cessions de portefeuilles de LP et les transactions non traditionnelles, avec des facteurs cycliques influençant les variations d’une année sur l’autre.

Évolution ces dernières années de l’activité du marché secondaire vers des opérations moins traditionnellesÉvolution ces dernières années de l’activité du marché secondaire vers des opérations moins traditionnelles

Source : Jefferies Global Secondary Market Review – Juillet 2023.

 

 

Solutions hybrides

Actions préférentielles

Un autre type de transaction dont la fréquence a augmenté est celui des actions privilégiées ou secondaires structurées. Dans le cadre de ces transactions, un fournisseur de capitaux secondaires offre un financement garanti par un portefeuille d’actifs ou un collatéral. Après l’investissement, les détenteurs d’actions privilégiées reçoivent une part disproportionnée de la valeur du portefeuille jusqu’à ce que l’investissement initial soit remboursé sur la base d’un rendement contractuel, tout en bénéficiant d’un potentiel haussier supplémentaire en fonction de la croissance du portefeuille par la suite.

Les GP ont recours aux actions privilégiées pour mettre en œuvre des stratégies « buy and build » avec des sociétés de portefeuille dans des fonds dont le capital restant est limité, mais pour lesquels une prolongation de la période de détention par le biais d’un fonds de continuation n’est pas forcément nécessaire. À l’instar d’autres solutions du marché secondaire, les GP peuvent utiliser le produit d’opérations d’actions privilégiées pour satisfaire les LP cherchant à obtenir des liquidités plus rapidement sans renoncer à la totalité de leurs gains. Dans certaines transactions secondaires plus complexes et multiformes, les actions privilégiées peuvent également être un outil utile pour satisfaire les exigences des différentes parties impliquées.

Pendant les périodes de crise en particulier, les solutions à base d’actions privilégiées peuvent fournir aux gérants, aux fonds ou aux actifs la liquidité voulue en échange d’un droit préférentiel sur les flux de trésorerie futurs. Les GP se tournent également vers les actions privilégiées plutôt que vers la dette en raison de la nature bilatérale de l’accord de financement et de l’absence de clauses restrictives. Les actions privilégiées ont suscité beaucoup d’intérêt pendant la pandémie de COVID-19, les GP se tournant vers cette stratégie pour financer les entreprises de leur portefeuille dont les revenus avaient été interrompus et qui n’avaient pas accès aux marchés du crédit. Avec ces transactions, les acheteurs pouvaient compter sur les caractéristiques de protection à la baisse pour déployer des capitaux plus tôt que d’autres types de transactions et les emprunteurs pouvaient tirer parti de la rapidité et de la souplesse de ces solutions de financement. Dans le contexte actuel, les actions privilégiées sont de plus en plus considérées comme un moyen de fournir ponctuellement des liquidités aux LP en place, tout en renforçant le bilan d’un actif.

Évolution du marché

Le marché des transactions secondaires devrait poursuivre sa trajectoire de croissance, le volume des transactions augmentant en parallèle de l’évolution des marchés non cotés en général. Les gérants secondaires devraient également continuer à innover pour contourner les limites structurelles des actifs non cotés et satisfaire les besoins variés des GP et des LP, en élaborant de nouvelles solutions pour pallier les déficiences et la complexité et assurer des performances attractives pour les investisseurs. Si le facteur taille reste nécessaire pour réaliser des transactions de portefeuille plus importantes et rester compétitif sur le marché, l’exécution de transactions secondaires dans les domaines en expansion autres que les opérations classiques de rachat de participations de LP exige également des capacités en termes de valorisation des différents types d’actifs et d’évaluation des flux de trésorerie à venir.

À mesure que la variété et la complexité des transactions augmentent, une combinaison d’expérience et de créativité sera nécessaire pour concevoir des solutions profitant à toutes les parties tout en préservant un alignement satisfaisant des intérêts. À l’avenir, pour réussir dans l’ensemble du spectre des solutions de capital, il faudra disposer de compétences étendues et d’une grande souplesse pour opérer en toute transparence dans différentes catégories d’actifs, ainsi que de compétences approfondies et ciblées pour structurer et exécuter des transactions complexes permettant d’assurer la liquidité et bien plus.

Preqin. Septembre 2023.

Evercore H1 2023 Secondary Market Survey. Juillet 2023.

Jefferies H1 2023 Global Secondary Market Review. À fin juillet 2023.

4 Jefferies H1 2023 Global Secondary Market Review. À fin juillet 2023.

5 Jefferies H1 2023 Global Secondary Market Review. À fin juillet 2023.

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