Durabilité

Marchés émergents, impact mondial : favoriser une croissance durable

30 juillet 2024 | 4 minute(s) de lecture
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Hiren Dasani
Co-Head, Emerging Markets Equity
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Basak Yavuz
Co-head of Emerging Markets
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Prakriti Sofat
Emerging Market Debt (EMD) Economist and Co-Head of EMD Environmental, Social and Governance
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Gurpreet Garewal
Macro Strategist, Global Fixed Income
Perspectives
Cette publication fait partie de la série Perspectives
Les marchés émergents jouent un rôle central dans les efforts mondiaux en matière de transition climatique et de croissance inclusive. Les investisseurs ont un rôle fondamental à jouer dans le financement de leur transition.
Principaux points à retenir
1
Financer la croissance durable
Les marchés actions et obligataires sont des sources clés de capitaux à l'échelle mondiale. Leur rôle dans la promotion d'une croissance durable et inclusive sur l'ensemble des marchés émergents est appelé à prendre de plus en plus d'importance.
2
Gestion active et dialogue avec les entreprises
Pour dynamiser les multiples aspects de la durabilité au sein des économies émergentes, de la croissance des énergies renouvelables à une plus grande inclusion financière, les investisseurs doivent selon nous adopter une approche active axée sur les indicateurs fondamentaux et un engagement auprès des équipes de direction des entreprises et des décideurs politiques.
3
Capital stratégique et contexte local
Parallèlement à une allocation stratégique des capitaux, il est essentiel de comprendre le contexte local dans la mesure où les économies émergentes se trouvent à des stades de développement différents et où elles jouent collectivement un rôle crucial dans la réalisation des objectifs mondiaux en matière de développement durable.

Les marchés émergents (ME) réunissent 86 % de la population mondiale1, représentent 60 % du PIB mondial et sont responsables d'environ 75 % des émissions mondiales de CO22. Leur rôle central dans l'économie mondiale met en lumière une réalité incontournable : les objectifs mondiaux en matière de développement durable ne sauraient être atteints sans la participation active des économies émergentes. Un large éventail de pays en développement allant de l'Afrique à l'Asie, en passant par l'Europe, l'Amérique latine et le Moyen-Orient, ainsi que les entreprises établies dans ces régions, devront donc mobiliser des capitaux importants tout en conciliant croissance économique, décarbonation et satisfaction des besoins de leurs populations respectives sur les plans sanitaire, éducatif et financier. Les marchés de capitaux joueront un rôle essentiel dans ce processus. Au sein des marchés actions et obligataires, des opportunités d'investissement se présentent pour soutenir les économies émergentes dans de nombreux domaines, comme le déploiement des énergies renouvelables et des solutions de transition climatique, la préservation de la biodiversité ou encore l'émancipation sociale des populations des ME.

Le bond en avant écologique

Découpler la croissance économique des émissions de CO2

La viabilité économique des technologies d'énergie propre ne cesse de s'améliorer, portée par un coût de plus en plus abordable et un rendement accru de l'énergie solaire et du stockage sur batterie. Cette dynamique suggère que les économies émergentes peuvent poursuivre leur croissance tout en se décarbonant, les énergies renouvelables constituant la solution optimale pour une production d'électricité durable. Dans les économies émergentes (à l'exclusion de la Chine), les énergies renouvelables représentaient environ 75 % de la nouvelle production d'électricité en 2022, contre 25 % au cours de la décennie précédente.3 Les initiatives en matière d'agriculture et de reboisement dans de nombreux ME ouvrent également de nouvelles perspectives de croissance économique qui visent simultanément à réduire l'empreinte carbone. Les ME se tournent progressivement vers les énergies renouvelables, mais le charbon, ainsi que le pétrole et le gaz, continuent d'occuper une place importante dans leur bouquet énergétique. Bien que la situation s'améliore, le chemin à parcourir dans la transition vers des sources d'énergie plus vertes est encore long.

Répondre aux besoins énergétiques croissants grâce aux énergies renouvelables

À mesure que le PIB mondial des économies émergentes continue d'augmenter et que les revenus des ME convergent progressivement vers ceux des marchés développés (MD), la fourniture de services essentiels aux populations défavorisées (775 millions de personnes sont privées d'électricité et 2 milliards ne disposent pas de solutions de cuisson propres) constitue un défi de taille.4 Les ME poursuivent également leur industrialisation, modernisent leur agriculture et développent leur habitat urbain. En outre, bien que leurs émissions par habitant soient inférieures à celles des MD, les ME sont plus vulnérables aux risques climatiques physiques, notamment dans les régions à faible revenu, ce qui exige un renforcement de leurs stratégies de résilience climatique. Répondre à la demande énergétique croissante par le biais des énergies renouvelables est primordial pour l'avenir climatique des économies émergentes ainsi que pour les efforts de durabilité déployés à l'échelle mondiale. Les investissements dans l'énergie propre sont essentiels tant pour l'action climatique que pour des objectifs de développement durable plus généraux, comme le logement abordable, la propreté de l'eau, l'assainissement et l'accès aux soins médicaux. La transition vers les énergies renouvelables peut également renforcer la résilience des économies en réduisant la dépendance aux importations de combustibles fossiles, en améliorant la balance courante et en réduisant les risques liés aux financements extérieurs.

Combler le déficit de capitaux

La croissance durable des économies émergentes exige un effort de collaboration et de lourds investissements de la part des pouvoirs publics, des entreprises et des investisseurs. En 2022, les investissements dans les énergies propres au sein des ME ont atteint environ 770 milliards de dollars, la Chine contribuant aux deux tiers de cette somme.5 Pour respecter les dispositions de l'Accord de Paris6 et répondre aux besoins énergétiques croissants, ces investissements vont devoir prendre de l'ampleur et atteindre 2 200 à 2 800 milliards de dollars par an d'ici les années 2030. Les établissements financiers du secteur privé jouent un rôle crucial, sachant que 60 % du financement des énergies propres en dehors de la Chine devrait provenir d'investisseurs institutionnels, de banques et d'autres entités privées et passer de 135 milliards de dollars aujourd'hui à 900-1 100 milliards de dollars par an d'ici le début des années 2030.7 L'Asie présente un potentiel significatif pour les investissements dans la durabilité portés par le secteur privé compte tenu de la forte dépendance actuelle à l'égard des pouvoirs publics et des banques publiques de développement en ce qui concerne les investissements émergents en matière d'énergie propre. En Inde, le secteur de l'électricité représente à lui seul une opportunité d'investissement de 650 milliards de dollars pour atteindre son objectif de 450 GW d'énergies renouvelables d'ici à 20308, tandis que le Viêt Nam pourrait devoir investir entre 8 et 10 milliards de dollars par an pour réaliser ses objectifs en matière d'énergies renouvelables9.

Financement de la transition climatique

Presque aucun des 2 500 milliards de dollars de fonds ESG (environnementaux, sociaux et de gouvernance) n'est investi dans les ME, ce qui illustre le vaste potentiel de croissance de l'investissement durable dans ces régions.10  Les marchés actions et obligataires offrent aux investisseurs de multiples possibilités d'aligner leurs portefeuilles sur des impacts positifs sur l'environnement sans pour autant sacrifier les performances potentielles. Les investisseurs peuvent exploiter les thèmes de la décarbonation des ME, comme l'approvisionnement en énergies renouvelables et les bâtiments écologiques, ou les secteurs dans lesquels il est notoirement difficile de réduire les émissions.

Sur le marché actions, plus de la moitié des entreprises cotées à l'indice MSCI EM se sont engagées en faveur de l'objectif de neutralité carbone. Cette tendance se retrouve sur le marché des obligations d'entreprises émergentes, où de nombreuses sociétés ont pris des engagements similaires. Cette situation ouvre aux investisseurs la possibilité d'allouer des capitaux aux « facilitateurs » qui favorisent la transition climatique par l'innovation, et aux entreprises qui adoptent des technologies plus propres afin de réduire leur empreinte carbone. Des entreprises émergentes fournissent ainsi des technologies de réduction des émissions de CO2 à des secteurs fortement émetteurs, comme ceux de l'aluminium et du ciment. 

Les ME comptent parmi les plus grands fournisseurs d'énergie verte au monde, comme l'hydroélectricité et le solaire. Certains ME ont déjà dépassé les pays développés pionniers dans l'adoption des technologies d'électrification des transports, plus de la moitié des véhicules électriques (VE) en circulation dans le monde se trouvant aujourd'hui en Chine.11  Le marché chinois des VE continue de croître à un rythme soutenu, les constructeurs automobiles locaux dépassant les acteurs établis du secteur pour se hisser au premier rang mondial en termes de ventes.

Les ventes de nouveaux VE en Chine devraient enregistrer une forte croissance jusqu'en 2030Les ventes de nouveaux VE en Chine devraient enregistrer une forte croissance jusqu'en 2030

Source : Association chinoise des constructeurs automobiles, Morgan Stanley Research. Estimations basées sur les prévisions de Morgan Stanley. Taux de croissance représenté par le taux de croissance annuel composé (TCAC) sur 10 ans de 2020 à 2030 et par une prévision de taux de croissance annuel composé de 28 %. Juin 2022.

Dans d'autres pays, les entreprises développent des technologies très innovantes pour alimenter leur secteur automobile. La plupart des voitures particulières commercialisées au Brésil peuvent désormais rouler avec un mélange d'essence et d'éthanol,12 un biocarburant dérivé de la canne à sucre, qui permet de réduire considérablement les émissions directes de CO2. En outre, certains pays comme le Mexique et la Corée du Sud sont susceptibles de bénéficier de la délocalisation de proximité (« nearshoring ») des chaînes d'approvisionnement des entreprises américaines dans le cadre de leur quête de sources d'énergie fiables, une tendance accélérée par les subventions accordées au titre des lois « Inflation Reduction Act » et « CHIPS and Science Act ». Pour les investisseurs en mesure de relever les défis actuels, des opportunités d'investissement existent dans les ME bénéficiant d'une forte dynamique économique, comme l'Inde, ainsi que dans les pays confrontés à des vents contraires temporaires, comme la Chine.

Pour les investisseurs obligataires, le marché des obligations vertes, sociales et durables (GSS) émergentes constitue une voie de choix pour soutenir les efforts de transition climatique dans les pays émergents. Les obligations GSS présentent le même risque de crédit que les obligations conventionnelles du même émetteur et apportent une certaine transparence dans l'allocation des fonds. Les investisseurs peuvent suivre et évaluer l'impact des projets financés par ces obligations grâce à des rapports détaillés et s'engager auprès des émetteurs sur des cadres de durabilité. Cela étant, il peut être difficile d'accéder à des données de qualité dans le paysage d'investissement des ME. En 2023, le marché des obligations GSS émergentes libellées en devises étrangères a progressé de 94 milliards de dollars pour atteindre 270 milliards de dollars.13 Le marché des obligations GSS émergentes libellées en devises locales, bien que plus modeste, est lui aussi en progression, l'Inde, la Thaïlande, Hong Kong et le Chili figurant en tête des pays émetteurs de ces titres.

Nouvelles émissions - Les obligations vertes dominent, mais l'offre d'obligations sociales et durables augmenteNouvelles émissions - Les obligations vertes dominent, mais l'offre d'obligations sociales et durables augmente

Source : Bond Radar, Bloomberg, Morgan Stanley Research. Reflète les émissions de dette extérieure souveraine, d'entreprise et quasi-souveraine Au 20 mai 2024. Les obligations liées au développement durable (SLB) sont souvent assorties d'une vague affectation des produits et d'indicateurs de performance limités en matière de durabilité à l'échelle de l'émetteur, rendant difficile l'évaluation du profil de durabilité de l'émetteur et de l'impact environnemental ou social de l'obligation. En outre, les SLB peuvent initialement bénéficier aux émetteurs offrant des coupons moins élevés sans que l'impact en termes de durabilité ne soit garanti, et les sanctions encourues en cas de non-respect des objectifs de durabilité sont généralement minimes, offrant ainsi une motivation insuffisante pour réaliser ces objectifs. Ces facteurs nous incitent à privilégier les obligations vertes et sociales au détriment des SLB.

Les obligations GSS offrent aux émetteurs émergents, qu'il s'agisse d'États souverains ou d'entreprises, un certain nombre d'avantages importants. Elles peuvent par exemple contribuer à garantir le financement de projets essentiels de réduction des émissions, qui risqueraient autrement d'être négligés en raison de priorités financières concurrentes. Le transport écologique est un axe prioritaire dans l'utilisation du produit des obligations GSS par les émetteurs des ME. Parmi les exemples notables figurent l'obligation sukuk verte de l'Indonésie, qui consacre des fonds à des initiatives de transport durable, et l'obligation verte de l'Égypte, qui soutient le projet de monorail du Caire. Par ailleurs, les obligations GSS émergentes attirent des investisseurs mondiaux axés sur le développement durable, ce qui permet aux entreprises et aux États souverains des pays émergents de diversifier leurs sources de financement. L'émission d'obligations GSS témoigne également d'un engagement en faveur de la durabilité, lequel peut ouvrir des perspectives de financement dans le cadre de programmes comme les subventions du plan Next Generation EU ou la Facilité pour la résilience et la durabilité du FMI.

Biodiversité - Un allié de poids dans la lutte contre le changement climatique

La préservation de la biodiversité est essentielle pour la santé de l'environnement et de l'économie. Les océans et les forêts tropicales, principalement situés dans les ME, sont essentiels pour la séquestration du carbone.14  D'ici à 2030, la préservation des écosystèmes pourrait générer des opportunités de revenus de 10 100 milliards de dollars et créer 305 millions d'emplois.15  Les obligations souveraines des pays émergents qui soutiennent la biodiversité peuvent offrir un moyen plus immédiat d'obtenir des avantages environnementaux et une croissance durable que les initiatives climatiques prises par les entreprises ou les États. Par exemple, le produit des obligations bleues de la Barbade vise à protéger 4 millions de kilomètres carrés d'océan, soit 13 % des récifs coralliens du monde, et à apporter une contribution positive à 43 millions de personnes.16  Bien que l'émission d'obligations bleues ait été de faible ampleur, elle a suscité le lancement d'initiatives similaires aux Seychelles et à Fidji, soulignant ainsi le potentiel de gains environnementaux et économiques substantiels. Les efforts en faveur de la biodiversité peuvent également contribuer à la protection de l'environnement et au redressement économique, comme le montre l'obligation bleue 2020 du Belize pour la préservation des récifs coralliens, qui intègre les facteurs ESG dans la restructuration de la dette souveraine afin de promouvoir le redressement économique et la résilience climatique.

Sur les marchés actions, les modèles économiques qui soutiennent l'économie circulaire, la transition énergétique et l'efficacité des ressources sont essentiels pour lutter contre la perte de biodiversité liée au changement climatique, à la pollution et à l'exploitation des ressources. Ces modèles économiques représentent également des opportunités d'investissement potentielles compte tenu de la croissance rapide des ME et des efforts concertés déployés pour faire face aux enjeux environnementaux. Par exemple, les ME sont d'importants fournisseurs de métaux, la Chine étant le premier producteur d'aluminium, une matière première essentielle pour les technologies vertes, mais également très énergivore et polluante. Investir dans un secteur de l'aluminium plus écologique est indispensable pour réaliser les objectifs mondiaux de décarbonation ainsi que les ambitions de la Chine en matière de réduction de la pollution et d'optimisation de l'utilisation des ressources. Toutefois, l'évaluation des progrès en matière de capital naturel et de biodiversité pour les émetteurs d'actions ou d'obligations est une tâche complexe en l'absence d'indicateur unifié comme les émissions de gaz à effet de serre pour le changement climatique. Le Groupe de travail sur la publication d'informations financières relatives à la nature fournit un cadre permettant aux entreprises et aux investisseurs d'intégrer la biodiversité dans leur processus décisionnel et dans leurs efforts de conservation.

Financer une croissance inclusive

L'objectif d'une croissance inclusive est d'offrir des opportunités à tous, y compris au sein des économies émergentes. Les investisseurs peuvent promouvoir la durabilité sociale en soutenant les entreprises qui mettent l'accent sur des services essentiels comme le logement abordable, la propreté de l'eau et l'énergie propre. Il est également essentiel d'investir dans des entreprises qui permettent d'accéder à des financements et à une éducation innovante. La hausse des émissions d'obligations sociales au sein des ME traduit un engagement en faveur d'objectifs sociaux, ce qui en fait une option attrayante pour les portefeuilles de titres obligataires socialement responsables.

Liens entre inclusion numérique et inclusion financière

On estime que 96 % des 2,9 milliards de personnes qui n'ont pas accès à Internet dans le monde résident dans les ME.17  Le  développement et l'exploitation des infrastructures de télécommunications  sont essentiels pour renforcer l'inclusion numérique. Celle-ci, en retour, facilite l'accès aux services bancaires mobiles et à un large éventail de prestations financières en faveur des personnes non bancarisées ou sous-bancarisées dans les pays émergents. Environ 1,4 milliard de personnes à travers le monde n'ont pas accès aux services financiers officiels et ont souvent recours à des méthodes de financement informelles coûteuses qui aggravent leurs difficultés financières.18  Les comptes numériques favorisent une épargne efficace et des emprunts abordables et constituent souvent la première étape vers le financement des études et des soins médicaux. Les services financiers numériques élargissent également les choix proposés aux personnes à faible revenu, encourageant ainsi l'indépendance et la résilience financières.

Renforcer la place des femmes dans l’économie des ME

Le processus d'émancipation des femmes, qui leur permet de participer pleinement à l'économie et à la société, est essentiel à la croissance économique. L'inclusion financière est un aspect essentiel de ce processus, notamment pour les femmes entrepreneurs des ME qui rencontrent souvent des difficultés de financement. L'indépendance financière permet aux femmes de faire de meilleurs choix pour leur famille, comme l'achat de produits alimentaires nutritifs et de médicaments, et d'investir dans l'éducation, améliorant ainsi leur qualité de vie et contribuant au progrès économique et social de leur communauté. Or, de nombreuses femmes demeurent sous-bancarisées, certaines régions comptant jusqu'à deux tiers de femmes n'ayant pas accès à des services financiers officiels. Parmi les obstacles figurent des exigences strictes en matière de garanties, souvent liées à des actifs non enregistrés à leur nom, des processus de candidature complexes et des taux d'intérêt élevés. Les investisseurs ont la possibilité de promouvoir la durabilité sociale et d'exploiter le potentiel économique des femmes en soutenant les établissements financiers des ME qui répondent aux besoins des femmes. Par exemple, en Amérique latine, une société de services financiers axée sur les microentrepreneurs révèle que près de 90 % de ses clients sont des femmes. Les prêts numériques basés sur les flux de trésorerie peuvent également faciliter l'accès au crédit pour les femmes cheffes d'entreprise en contournant les exigences traditionnelles en matière de garanties qui excluent souvent les femmes.

Soutenir l’entrepreneuriat

Les micro, petites et moyennes entreprises (MPME) forment l'épine dorsale de nombreuses économies, et représentent environ 90 % des entreprises mondiales.19  Dans les pays émergents, les MPME génèrent jusqu'à 40 % du revenu national.20  Toutefois, près de la moitié des MPME des ME rencontrent des difficultés de financement, avec un déficit annuel collectif de 5 200 milliards de dollars.21  Soutenir ces entrepreneurs, y compris les 23 % d'entreprises détenues par des femmes (soit 32 % du déficit de financement des MPME), peut contribuer de manière significative à faire progresser l'égalité des sexes et l'inclusion financière. Les sociétés du secteur de la Fintech, les banques et les assureurs qui proposent leurs services aux ME sont susceptibles d'accéder à des marchés importants, négligés et en pleine croissance. Des opportunités d'investissement se présentent dans les actions et les obligations sociales et durables des ME qui visent à réduire le déficit de financement. Certaines entreprises indonésiennes et indiennes proposent par exemple des prêts pour fonds de roulement aux MPME. Globalement, les investisseurs disposent de nombreux moyens pour promouvoir une croissance inclusive. Ils peuvent soutenir les entreprises qui facilitent l'accès à Internet et aux services financiers, investir dans des entreprises du secteur de la Fintech qui comblent le fossé en matière d'inclusion financière numérique, et aider les MPME. La réduction des inégalités numériques et financières est également une démarche stratégique pour réduire les inégalités entre les sexes, contribuant ainsi à une économie plus inclusive.

Perspectives du portefeuille

Pour concrétiser les opportunités d'investissement durable dans les ME, il est essentiel d'adopter une gestion active, de reconnaître les défis et les possibilités que présente le manque de données, et de comprendre le contexte local en vue de révéler des opportunités uniques. La prise en compte de ces facteurs permet aux investisseurs de gérer les risques et de tirer parti du potentiel spécifique des ME en matière de développement durable et d'impact.

Adopter une approche active

En matière d'investissement durable dans les ME, les investisseurs doivent faire preuve de la même rigueur que pour l'investissement traditionnel. Une prise de conscience de l'existence de risques plus élevés, comme les risques financiers liés à la distribution d'électricité, les défis liés à l'acquisition de terres et les risques spécifiques à certains pays émergents, est cruciale. Pour les obligations GSS émergentes, il est essentiel d'évaluer le profil de durabilité de l'émetteur et l'utilisation du produit pour garantir des résultats tangibles. La profondeur de cette analyse doit être comparable à celle des évaluations traditionnelles du risque de crédit. Il est également important de prendre en compte l'alignement sur des normes comme les Principes applicables aux obligations vertes de l'International Capital Market Association (ICMA) et d'analyser en détail l'utilisation du produit, le calendrier d'affectation et les modalités de gestion. L'établissement de rapports continus sur l'affectation des fonds jusqu'à l'échéance de l'obligation et la recherche de vérifications externes et d'avis complémentaires s'inscrivent également dans le cadre des meilleures pratiques. Une collaboration avec des gérants d'actifs expérimentés à la fois dans le domaine des ME et de l'investissement durable peut permettre de trouver des solutions d'investissement ayant un impact sur les enjeux climatiques, écologiques et sociaux.

Viser à combler les lacunes en matière de données

Les entités des ME sont susceptibles de ne pas disposer des ressources nécessaires pour communiquer des données exhaustives en matière de durabilité. Ces lacunes en matière de données peuvent donner lieu à des perceptions de risque d’investissement élevé. Les investisseurs peuvent surmonter ces difficultés en privilégiant les indicateurs fondamentaux et en s'engageant activement auprès des équipes de direction des entreprises et des décideurs politiques. Recueillir des données sur les émissions et les plans de transition des entreprises peut également permettre de réduire les obstacles à l'investissement. Certains pays d'Asie du Sud-Est s'orientent déjà vers une obligation d'information concernant les émissions de gaz à effet de serre pour les entreprises cotées en bourse. Dans la mesure où l'investissement durable est de plus en plus axé sur les données, l'évaluation de l'impact environnemental et social est essentielle pour les investisseurs sur les marchés tant émergents que développés.

Comprendre le contexte local

Les économies émergentes se situent à des stades de développement différents et sont source d'opportunités uniques. Les notations ESG standard sont susceptibles de ne pas rendre pleinement compte des risques et des opportunités spécifiques présents dans les ME, au risque de conduire à une mauvaise affectation des capitaux. Le fait d'adapter l'analyse au contexte local, comme le PIB par habitant, et de privilégier les plans de développement durable tournés vers l'avenir peut contribuer à atténuer le biais de revenu qui oriente souvent les capitaux vers les pays les plus riches. Bien que les entreprises des MD soient en pointe en matière de développement durable, les ME présentent des opportunités d'investissement distinctes que l'on ne retrouve pas au sein des MD. Par exemple, la prise en compte des coutumes locales, comme l'impact financier de funérailles coûteuses en Afrique, peut mettre en évidence des opportunités en matière d'impact social pour les entreprises qui proposent des options de financement des funérailles aux particuliers à faible revenu, tout en assurant une éducation financière. La bonne compréhension de ces nuances permet à l'investisseur de favoriser une croissance inclusive.

Les ME occupent une place cruciale dans les efforts mondiaux en faveur du développement durable. L'allocation stratégique de capitaux sur les marchés actions et obligataires est essentielle pour que les ME puissent satisfaire durablement la demande croissante d'énergie, contribuer aux objectifs mondiaux de développement durable et parvenir à la résilience économique. Bien qu'ils présentent certains risques, les ME offrent également des opportunités d'investissement majeures pour les investisseurs mondiaux soucieux de favoriser la transition climatique et la croissance inclusive au sein des économies émergentes et, par extension, de l'économie mondiale.

1Fonds monétaire international. Avril 2024.
2Brookings. Avril 2023. À titre comparatif, les économies développées affichent des émissions de CO2 par habitant nettement plus élevées que celles des économies émergentes. 
3Bloomberg. Décembre 2023. 
4Agence internationale de l’énergie (AIE). Avril 2023. 
5AIE. Juin 2023. 
6L'Accord de Paris est un traité international signé en 2015 par 196 parties, qui vise à réduire les émissions de gaz à effet de serre et à limiter le réchauffement climatique au cours de ce siècle à un niveau nettement inférieur à 2°C, de préférence à 1,5°C, par rapport aux niveaux préindustriels. 
7AIE. Juin 2023. 
Climate Finance Leadership Initiative. Avril 2024. 
9United States Agency for International Development. Septembre 2020. 10AIE. Juin 2023. 
11AIE. Avril 2023.  
12Financial Times. Au 26 mai 2024
13Bond Radar, Bloomberg, Morgan Stanley Research. Au 13 mai 2024.
14Un "puits de carbone" est un réservoir naturel ou artificiel qui accumule et stocke des composés chimiques contenant du carbone pendant une période indéterminée. L'océan absorbe environ 25 % de toutes les émissions de CO2, réduisant ainsi considérablement l'impact des gaz à effet de serre sur le climat. La séquestration du carbone est un procédé qui consiste à capter et à stocker le dioxyde de carbone présent dans l'atmosphère. Cette méthode est utilisée pour réduire la quantité de CO2 dans l'atmosphère dans le but d'atténuer le changement climatique mondial.
15Forum économique mondial. Juillet 2020.
16US International Development Finance Corporation. Août 2019.
17International Telecommunication Union. Novembre 2021.
18Banque mondiale. Septembre 2022.
19Banque mondiale. Octobre 2019. La contribution des MPME au revenu national est vraisemblablement plus élevée si l'on tient compte du secteur informel.
20Banque mondiale. Octobre 2019.
21Banque mondiale. Janvier 2017.

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